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Cet article a été publié dans le numéro d’Actualité Juive du 3 janvier 2019
Selon une récente enquête menée par l’IFOP pour la Fondation Jean Jaurès, 10% des français n’ont jamais entendu parler de la Shoah, et la proportion grimpe à 19% chez les sondés âgés de 18 à 34 ans. Par ailleurs, les français sont 21% à ne pas connaître la période durant laquelle la Shoah a été perpétrée. Inconcevable et pourtant réel. Cette page de l’histoire, parmi les plus noires que l’humanité ait connu, qui a vu six millions de juifs être exterminés dont un million d’enfants, devient de plus en plus étrangère à nos concitoyens.
Comment en est-on arrivé là ? Qui a échoué ? Au vu de l’ampleur de ceux qui disent ne pas savoir ce qu’est la Shoah, notamment chez les plus jeunes, on peut s’interroger sur son enseignement dans les écoles, quand on sait en outre qu’elle ne peut plus depuis bien longtemps être expliquée dans certaines classes de nos collèges et lycées, et que la place qui lui est réservée dans les programmes scolaires est progressivement remise en cause, réforme après réforme.
Et pourtant, ce rôle de l’école est d’autant plus important que les derniers survivants de l’indicible nous quittent inexorablement. Marceline Loridan-Ivens, Charles Testyler, Ida Grinspan, Maurice Jablonski, et plus récemment Noah Klieger et Georges Loinger, sans oublier bien sûr le passeur de Mémoire Claude Lanzmann, pour ne penser qu’à eux, sont partis en 2018. Ces consciences humaines qui avaient tant fait pour transmettre et combattre l’oubli et le mensonge, ne seront plus là pour rappeler avec leurs témoignages vécus, vivants et irremplaçables, avec leurs mots, leurs regards, leurs voix, et cette force teintée d’effroi et d’espérance, ce que l’homme a commis de pire dans l’acceptation et l’ indifférence.
Dans ce contexte, il est d’une urgente nécessité d’envisager le devoir de transmission et de Mémoire autrement. Non seulement pour ne pas oublier l’histoire, mais aussi pour combattre la résurgence de certaines de ses plus graves dérives. Par ces temps troublés où l’antisémitisme se répand, où le populisme et le négationnisme donnent de la voix, où des tombes juives sont profanées de croix gammées, et où des juifs sont tués parce que juifs, il va de la responsabilité de la nation dans son ensemble de s’atteler à ce renouveau du travail de Mémoire, qui a longtemps été un rempart contre la haine et qui doit le redevenir, et de prendre le relais de la parole des survivants qui se tait progressivement.
Cela suppose un effort sans précédent de la part des pouvoirs publics, des enseignants, des intellectuels, des journalistes, pour à la fois transmettre ce qu’a été la Shoah, et combattre tous ceux qui cherchent à souiller et à éteindre cette flamme de la Mémoire dont la lumière est devenue si fragile. Au-delà des discours et des cérémonies commémoratives, ce sont l’éducation et la culture, au travers de projets porteurs, ambitieux, de qualité et destinés au plus grand nombre dans les écoles et les lieux de savoir, qui doivent être au cœur de cette priorité politique et de cet effort national.
Aujourd’hui, avec une Mémoire qui vacille, c’est la haine anti-juive et ses passages à l’acte qui sont à nouveau libérés. Demain, avec une Mémoire en danger, c’est l’histoire et ce qu’elle a de plus tragique qui s’éloignera des esprits et menacera de se répéter. Le principal complice du pire est l’ignorance.
A travers notre histoire, notre héritage et notre culture, la Mémoire fait depuis toujours partie intégrante et constitutive du judaïsme. Elle en est la force, le ciment et l’identité. A l’heure où l’ignorance monte, où les témoins disparaissent et où la haine s’installe, la Mémoire de la Shoah, et de tous les génocides du siècle passé, doit désormais être saisie et portée par toute la société. Face à ses vieux démons qui la menacent, c’est aussi là une condition nécessaire à la construction de son avenir apaisé et harmonieux.
Selon une récente enquête menée par l’IFOP pour la Fondation Jean Jaurès, 10% des français n’ont jamais entendu parler de la Shoah, et la proportion grimpe à 19% chez les sondés âgés de 18 à 34 ans. Par ailleurs, les français sont 21% à ne pas connaître la période durant laquelle la Shoah a été perpétrée. Inconcevable et pourtant réel. Cette page de l’histoire, parmi les plus noires que l’humanité ait connu, qui a vu six millions de juifs être exterminés dont un million d’enfants, devient de plus en plus étrangère à nos concitoyens.
Comment en est-on arrivé là ? Qui a échoué ? Au vu de l’ampleur de ceux qui disent ne pas savoir ce qu’est la Shoah, notamment chez les plus jeunes, on peut s’interroger sur son enseignement dans les écoles, quand on sait en outre qu’elle ne peut plus depuis bien longtemps être expliquée dans
Et pourtant, ce rôle de l’école est d’autant plus important que les derniers survivants de l’indicible nous quittent inexorablement. Marceline Loridan-Ivens, Charles Testyler, Ida Grinspan, Maurice Jablonski, et plus récemment Noah Klieger et Georges Loinger, sans oublier
Dans ce contexte, il est d’une urgente nécessité d’envisager le devoir de transmission et de Mémoire autrement. Non seulement pour ne pas oublier l’histoire, mais aussi pour combattre la résurgence de certaines de ses plus graves dérives. Par ces temps troublés où l’antisémitisme se répand, où le populisme et le négationnisme donnent de la voix, où des tombes juives sont profanées de croix gammées, et où des juifs sont tués parce que juifs, il va de la responsabilité de la nation dans son ensemble de s’atteler à ce renouveau du travail de Mémoire, qui a longtemps été un rempart contre la haine et qui doit le redevenir, et de prendre le relais de la parole des survivants qui se tait progressivement.
Cela suppose un effort sans précédent de la part des pouvoirs publics, des enseignants, des intellectuels, des journalistes, pour à la fois transmettre ce qu’a été la Shoah, et combattre tous ceux qui cherchent à souiller et à éteindre cette flamme de la Mémoire dont la lumière est devenue si fragile. Au-delà des discours et des cérémonies commémoratives, ce sont l’éducation et la culture, au travers de projets porteurs, ambitieux, de qualité et destinés au plus grand nombre dans les écoles et les lieux de savoir, qui doivent être au cœur de cette priorité politique et de cet effort national.
Aujourd’hui, avec une Mémoire qui vacille, c’est la haine anti-juive et ses passages à l’acte qui sont à nouveau libérés. Demain, avec une Mémoire en danger, c’est l’histoire et ce qu’elle a de plus tragique qui s’éloignera des esprits et menacera de se répéter. Le principal complice du pire est l’ignorance.
A travers notre histoire, notre héritage et notre culture, la Mémoire fait depuis toujours partie intégrante et constitutive du judaïsme. Elle en est la force, le ciment et l’identité. A l’heure où l’ignorance monte, où les témoins disparaissent et où la haine s’installe, la Mémoire de la Shoah, et de tous les génocides du siècle passé, doit désormais être saisie et portée par toute la société. Face à ses vieux démons qui la menacent, c’est aussi là une condition nécessaire à la construction de son avenir apaisé et harmonieux.
Philippe Meyer
Président du B'nai B'rith France